Angèle fermait toujours le restaurant elle-même, c’était une habitude qu’elle avait pris dès l’obtention de sa première table et qui ne l’avait jamais quitté depuis. Chaque soir de service, c’était la même routine. Un peu avant minuit, il fallait raccompagner les derniers clients vers la porte sans être trop brusque pour ne pas énerver ces gens à la fierté gonflée par l’argent. Au milieu de la nuit, les salles étaient alors soulevées par un dernier souffle de vie. Les serveurs terminaient de ranger toute la vaisselle, laissant une salle vide et prête pour le passage de l’équipe de ménage au petit matin. En cuisine, les plongeurs terminaient leur vaisselles le plus rapidement possible, cherchant à rentrer chez eux au plus tôt. Puis, une fois tout à sa place, chacun repartait chez soi.
Alors ne restait qu’Angèle et sa cuisine vide, silencieux royaume. Une fois seule, elle aimait tout revérifier une dernière fois, ranger les quelques objets laissés de côté, laisser sa main glisser sur son plan de travail. Puis sûr d’avoir fait une bonne journée, elle quittait l’immeuble et s’allumait une cigarette au niveau de la sortie de service. C’était une de ces soirées de travail qu’Angèle entendit un bruit dans l’une des poubelles près d’elle. Au début, la chef ne fit rien. Un rat profitant des déchets d’un restaurant, ce n’était pas étonnant. Seulement, quelques secondes plus tard, la poubelle fut secouée. C’est alors que la cuisinière se figea. Quoi que ce soit, la chose dans cette poubelle devait être bien grosse. Un rat n’aurait jamais pu bouger la poubelle ainsi. Mais assez grosse pour être un humain? Elle connaissait la misère régnant à Gotham et avait déjà vu des gens fouiller ses poubelles mais se mettre dedans, ça jamais. Elle frappa du plat de la main sur le couvercle de la grande poubelle.
“Il y a quelqu’un là dedans?”
Elle glissa sa main dans la poche arrière de son jean et en tira son trousseau de clef. D’un mouvement rapide, elle déplia la lame du couteau suisse accroché à ses clefs et une fois son moyen de défense en main, souleva lentement le couvercle. D’abord, tout était noir puis, Angèle vit deux yeux brillants à l’intérieur, dans l’obscurité. Et enfin quelle bête fouillait sa poubelle: un immonde et gros raton laveur. Elle cria en voyant l’animal et claqua le couvercle, reculant subitement de la poubelle. Bon sang, il fallait vraiment qu’elle appelle un service de dératisation pour se débarrasser de ce nuisible, et au plus vite.
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