Les cris résonnent dans la nuit noir. Des cris terribles et perçants qui vous remontent le long du dos et vous hérissent le poil. Ce sont ceux d’une femme en train de souffrir, de mourir, une femme qu’on est en train de battre à mort. Ils s'étirent dans la nuit ces terribles cris, montent le long des caniveaux et des immeubles sombres pour résonner dans toutes les rues alentoures. Chacun peut les entendre. Les cris semblent durer une éternité avant de peu à peu se transformer en plaintes chétives, plus faibles que celle d’un chiot, et de disparaître. Alors ne persistent que le bruit sourd des coups. Personne n’ira aider cette femme, personne. Elle va mourir ce soir sous ses coups et tout le monde l’aura entendu mourir. Mais personne ne saura jamais qui elle était, cette femme qui hurlait dans la nuit. Enfin si, une personne connaîtra son identité, une personne qui emportera le souvenir de cette nuit et ses cris en dernier souvenir. L’enfant caché dans le placard, cachant ses oreilles pour essayer d’arrêter les cris. Mais pour cette petite fille en pleur, les cris ne disparaîtront jamais. Ils reviendront la hanter la nuit, encore et encore.

Liu se réveille subitement, suante, haletante. Devant elle, l’écran de son ordinateur est allumé et affiche les lignes de codes de son projet du moment. La jeune femme soupire et penche sa tête en avant, plaçant ses mains sur ses oreilles comme pour bloquer tout son alentour, bien que ceux-ci se résument au très léger soufflement de sa tour pc. Ses lèvres sont tremblantes. Elle garde ses mains à leurs place mais commence à se masser les tempes. Non. Les sons qu’elle chasse sont dans son esprit. Merde. Elle s’est encore endormie devant son écran. Et ce cauchemar qui lui revient encore, même après toutes ses années. Elle essuie la sueur de terreur qui a coulé à la fine limite de son front et de sa chevelure et fait glisser son siège loin du bureau. Son réveil affiche 16 heures et Liu ne peut s'empêcher de grimacer en se rendant compte qu’elle vient de manquer toute la journée. Au moins, elle a dormi presque dix heures et rattrapé une partie de son sommeil en retard de la semaine.

Puis un mot lui vient à l’esprit. Boulot. Liu sort son téléphone et y découvre avec terreur six appels manqués et une dizaine de messages. Elle ne devait commencer sa journée qu’à 13h mais, c’est tout de même déjà un sacré retard et, au final, elle n’a même pas fini de coder le logiciel pour lequel elle est restée éveillée si tard. Bon sang… Bon sang! Cette fois, Liu pouvait en être sur et certaine, son patron allait la mettre à la porte. Dommage. Elle avait vraiment bien aimé travailler pour Queen Industries: on lui avait donné un bureau dans un coin tranquille, un bon salaire, du matériel dernier cris et une assez grande libertée d'horaire pour qu’elle puisse travailler à sa manière et donc, au mieux. Liu n’aurait pas survécu dans un open-space normal.La jeune emme attrapa son téléphone, son manteau et descendit les marches de son hall d'immeuble à toute vitesse. Elle n’avait pas envie de perdre ce travail, pour la première fois depuis longtemps, Liu c’était sentie appartenir à un groupe.

Quatre minutes avant le prochain tram affichait l’écran à son arrêt. Elle envoya un message à sa supérieur au service informatique, lui promettant d’être à son bureau dans une vingtaine de minutes. Il n’allait pas la virer pour une seule fois, essaya de se rassurer la jeune femme alors que le tram arrivait. Elle monta, valida et s’assit près de la fenêtre. Elle qui venait de refaire tout le premier bouclier de protection des données de l’entreprise, elle qui était en train de travailler d’arrache pieds sur une amélioration révolutionnaire du système de reconnaissance faciale. Sans se vanter, elle était bien meilleur que le reste de ces pathétiques informaticiens de Queen Enterprises, on n’allait pas la virer pour un petit retard. Alors que le tram s’éloignait du sol pour commencer à glisser entre les immeubles dans les airs, Liu entendit soudain un bruit sourd au dessus de sa tête. Elle fronça les sourcils? Le son semblait trop important pour qu’il ne s’agisse que d’un oiseau s’étant cogné.

Soudain un homme s’assit à côté d’elle et Liu se contracta. La rame était libre mais il venait de s'asseoir juste à côté d’elle, l’homme n’allait sûrement pas la laisser tranquille. A travers leur reflet dans la vitre, elle vit qu’il s’agissait d’un homme d’origine asiatique dans la trentaine et ensuite, elle vit aussi qu’il pointait un pistolet contre ses côtes. Elle ravala sa salive alors que l’homme se penchait vers son oreille pour lui murmurer quelques mots en chinois.

“Tu vas gentillement me suivre Liu Nan. Surtout pas un bruit, sois une bonne fille”

Liu ferma les yeux. Ses mains enfoncées dans la poche de son pull, ses doigts glissaient sur le clavier sans qu’elle ait besoin de les regarder “CALL HELP”. Cependant; ce qu’elle ne savait pas était la personne à qui elle venait d’envoyer le message: Oliver Queen.